La diversité des oiseaux et des mammifères se raréfie avec les invasions biologiques

Communiqué de presse Terre et environnement
  • Les invasions biologiques sont l’un des plus importants facteurs de perte de la biodiversité.
  • Elles menacent la diversité des stratégies écologiques, autrement dit les moyens qu’ont les espèces de se nourrir, de vivre, de fonctionner et de se défendre, à hauteur de 40% chez les oiseaux et de 11% chez les mammifères.
  • 11 % de la diversité des oiseaux et des mammifères sur le plan évolutif, c’est-à-dire leur histoire évolutive accumulée, est aussi menacée par les invasions biologiques

L’introduction d’espèces envahissantes entraîne un déclin de certaines espèces autochtones : l'équipe de Céline Bellard, chercheuse CNRS au laboratoire Ecologie systématique et évolution - ESE (CNRS/UPSaclay/AgroParisTech) à Orsay, a réussi à montrer que 11 % de la diversité phylogénétique mondiale des oiseaux et des mammifères, autrement dit leur histoire évolutive accumulée, est menacée par les invasions biologiques. Leur potentiel adaptatif aux changements environnementaux pourrait ainsi en grande partie disparaître en raison des invasions biologiques. Ces travaux, publiés dans Global Change Biology le 2 août 2021, permettent de mieux entrevoir l’avenir des écosystèmes et les pertes de certaines espèces.

La mondialisation a conduit à une augmentation des introductions d’espèces en dehors de leur répartition naturelle. Tout comme le frelon asiatique en France, l’introduction d’espèces dites envahissantes entraîne un déclin de certaines espèces locales : les invasions biologiques représentent l’un des plus importants facteurs de perte de la biodiversité à l’échelle mondiale et la première cause au niveau des territoires insulaires.

Jusqu’à présent, les études portant sur les invasions biologiques se concentraient principalement sur le nombre d’espèces menacées d’extinction. L’étude menée par des scientifiques du laboratoire ESE permet d’aller plus loin en déterminant et en quantifiant les profils des espèces d’oiseaux et de mammifères en danger.

Les chercheuses ont ainsi montré qu’au total 11 % de la diversité phylogénétique de ces deux groupes, autrement dit leur histoire évolutive accumulée, est menacée par les invasions biologiques. Elles ont également prouvé que l’impact des espèces envahissantes est encore plus important sur les stratégies écologiques de ces groupes, soit les moyens dont elles disposent pour se nourrir, vivre, fonctionner et se défendre des autres espèces. Les invasions biologiques menacent 40 % de la diversité des stratégies écologiques des oiseaux et 14 % de celle des mammifères.

Ces travaux confirment que les oiseaux sont un groupe particulièrement vulnérable aux invasions. En effet, beaucoup d’oiseaux, notamment des régions océaniques insulaires, sont moins capables que leurs semblables continentaux d’adapter leurs stratégies face aux espèces envahissantes plus généralistes.

Par exemple, le kagou huppé, espèce emblématique de Nouvelle-Calédonie qui est unique d’un point de vu phylogénétique, car seul représentant de la famille des Rhynochetidae, se trouve menacé notamment par le rat. En effet, cet oiseau ne vole pas et se nourrit uniquement au sol. Il est donc incapable de s’adapter face à un nouveau prédateur terrestre tel que le rat. D’autres espèces d’oiseaux, notamment des pollinisateurs et des espèces qui dispersent les graines, se trouvent aussi en danger à cause des invasions biologiques. La disparition de ces espèces aurait donc des conséquences sur le fonctionnement des écosystèmes dont elles sont des éléments actifs.

Ces recherches permettent de mieux anticiper les futures pertes chez les oiseaux et les mammifères ainsi que les éventuelles conséquences sur les écosystèmes.

Photo d’une Bernache du Canada, une espèce envahissante présente en France qui est en conflit avec diverses espèces locales d’oiseaux. © Camille Bernery
Bibliographie

Looming extinctions due to invasive species: Irreversible loss of ecological strategy and evolutionary history. Céline Bellard, Camille Bernery et Camille Leclerc. Global Change Biology, le 2 août 2021. DOI : 10.1111/gcb.1577

Contact :

Céline Bellard, Chercheuse CNRS au laboratoire ESE