Modéliser les « réseaux » de réactions biochimiques grâce à l’intelligence artificielle
Grâce à leur expertise en biochimie, les chercheurs d’innatelogic développent une IA qui sera capable de modéliser des réseaux de réactions biochimiques. Ce projet fait partie des lauréats 2022 du programme RISE du CNRS.
Comprendre les réactions biochimiques nécessite une connaissance avancée des mécanismes et des différentes interactions entre des molécules très variées, allant de l’ADN aux protéines en surface des cellules. Ces réactions peuvent être vues comme un réseau d’une complexité élevée, rendant toute modélisation très lourde et intense en calculs, impossible à réaliser à la main. La start-up innatelogic développe une approche d’intelligence artificielle (IA) pour résoudre ce problème.
Créée par Benedikt Bollig (directeur de recherche au CNRS), Matthias Függer (chargé de recherche au CNRS) et Thomas Nowak (maître de conférences à l'Université Paris-Saclay) au LISN1 et au LMF2 , innatelogic est lauréate de l'appel à projets RISE 2022. RISE est un programme du CNRS proposant à une quinzaine de start-ups lauréates de l’appel à projet un accompagnement sur mesure d’un an, ainsi qu’une inclusion dans le réseau d’experts et de partenaires de CNRS Innovation pour structurer et développer leur projet.
« L’IA est actuellement la meilleure réponse aux problèmes d’optimisation, explique Matthias Függer. Il s’agit de trouver les meilleurs paramètres en testant de nombreuses possibilités, et les réseaux de neurones artificiels et méthodes de deep learning sont très efficaces à cet égard. » La méthode avec laquelle ils développent leurs algorithmes apporte cependant plus qu’une simple puissance de calcul supérieure.
Une IA profitant des expertises humaines
En effet, plutôt que de construire une IA qui rechercherait au hasard en tentant toutes les solutions, comme c’est souvent le cas, les chercheurs d’innatelogic utilisent leur expertise en biochimie pour « guider » les algorithmes. « Contrairement à de nombreuses IA actuelles, la nôtre n’est pas une ‘‘boîte noire’’, détaille Thomas Nowak. Nous donnons une structure à notre IA sur la base de nos connaissances des réactions biochimiques et des savoirs existants. » Cette approche a non seulement l’avantage de réduire les temps de calcul en limitant l’exploration de l’algorithme aux réactions d’intérêt possibles, mais permet également d’expliquer et de suivre la logique derrière le résultat présenté par l’IA.
Innatelogic proposera donc un outil lisible et facile d’utilisation qui permettra de décrire un réseau de réactions biochimiques et son évolution au cours du temps. « De plus en plus de recherches se font in silico, via simulation, ce qui accélère les processus et diminue les coûts explique Benedikt Bollig. Nous construisons un outil versatile capable de répondre à ce besoin, avec une interface utilisateur travaillée. Notre but est d’avoir un logiciel qui peut être utilisé sans manuel ! » Leur IA sera adaptable en fonction des bibliothèques d’expertise qui lui servent de base, avec de nombreuses applications possibles.
Les chercheurs prévoient deux utilisations principales de leur IA, capable de générer un modèle à partir de données partielles. En premier lieu, leur modèle pourra simuler la pharmacocinétique, c’est-à-dire la circulation d’un médicament dans l’organisme, son effet, et son devenir. En second lieu, l’IA sera une aide importante pour la bioingénierie, notamment en repérant le meilleur endroit pour modifier l’ADN, par exemple pour optimiser la bioproduction grâce aux bactéries.