ERC Synergy Grant 2020 : 3 projets impliquant le CNRS sur le territoire Paris-Saclay
Les résultats de l’appel ERC Synergy Grant 2020 ont été publiés le 5 novembre : parmi les 13 projets qui ont un partenaire français, 3 impliquent des chercheurs et chercheuses du CNRS ou relevant d’unités mixtes du territoire Paris-Saclay.
Ces bourses, qui bénéficient d’un financement allant jusqu’à 10 millions d’euros sur six ans, sont conçues pour permettre à des groupes de 2 à 4 scientifiques de s’attaquer à certains des problèmes de recherche les plus redoutables du monde, qui couvrent plusieurs disciplines scientifiques.
AWACA
"Atmospheric WAter Cycle over Antarctica : past, present and future", qui implique :
- Christophe Genthon, Directeur de recherche CNRS, et Thomas Dubos, Maître de conférences de l'Ecole Polytechnique, du Laboratoire de météorologie dynamique - LMD (CNRS/Ecole Polytechnique/ENS Paris/Sorbonne Univ.)
- Valérie Masson-Delmotte, chercheuse CEA, Médaille d'argent 2020 du CNRS, du Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement - LSCE/IPSL (CNRS/CEA/UVSQ - Univ. Paris-Saclay)
La calotte glaciaire de l'Antarctique est le plus grand réservoir d'eau douce sur Terre. La contribution de l'Antarctique au niveau de la mer résulte du léger déséquilibre entre la quantité de neige accumulée sur le continent et un flux de glace de même ampleur qui se déverse dans l'océan.
La représentation correcte de la circulation atmosphérique, de la physique du changement de phase de l'eau et de son transport dans les modèles est primordiale pour simuler correctement les précipitations et l'accumulation de neige sur la calotte glaciaire antarctique et, en fin de compte, l'élévation du niveau de la mer. C'est le défi que le projet AWACA souhaite relever.
Les trois chercheurs français et Alexis Berne, professeur associé au Laboratoire de télédétection environnementale de l’EPFL (Suisse), vont conjuguer leurs expertises reconnues dans des domaines clés au regard de l'ambition du projet : observation, analyse, expérience de terrain et modélisation numérique de l'atmosphère.
Ils visent à déployer des instruments spécialement conçus pour observer l'eau atmosphérique an antarctique, couplés à de nouvelles paramétrisations de la physique pour les modèles climatiques. Cette expertise combinée leur permettra de caractériser et de simuler le cycle de l'eau atmosphérique au-dessus de l'Antarctique dans son ensemble et non par parties (par exemple d'un point de vue dynamique, microphysique ou isotopique) comme cela a été fait jusqu'à présent, afin de revisiter la variabilité climatique passée et de mieux prévoir les conditions climatiques futures au-dessus de l'Antarctique.
Projet APRES3 - Comment se forment les précipitations en Antarctique ?
Entre 2015 et 2016, une équipe de chercheurs suisses et français impliquant Christophe Genthon avait procédé à une première campagne de mesure à la base scientifique française de Dumont d’Urville, sur la côte Est de l’Antarctique, dans le cadre du programme scientifique APRES3.
Lire à ce propos sur le site du LMD (2017) : "Antarctique: le vent sublime les flocons de neige".
Audiodescription
HOPE
"Reverse engineering the assembly of the hippocampal scaffold with novel optical and transgenic strategies", qui implique :
- Emmanuel Beaurepaire, Directeur de recherche CNRS au Laboratoire d'optique et biosciences - LOB (CNRS/École polytechnique/INSERM),
- Rosa Cossart, Directrice de recherche CNRS (Unité INSERM, Aix-Marseille Univ.)
- Jean Livet, chercheur INSERM à l'Institut de la vision (CNRS, INSERM, Sorbonne Univ.)
Au cœur de notre cerveau, une structure joue un rôle clef dans la mémoire, et plus particulièrement dans l’acquisition et le maintien de nos souvenirs : l'hippocampe. Classiquement considéré comme un « GPS cognitif » pour l’espace et le temps, il est également le siège de notre mémoire épisodique.
Au cours de la dernière décennie, les circuits neuronaux de l'hippocampe ont été mieux décrits, en particulier par l'équipe de Rosa Cossart, directrice de l’Institut de neurobiologie de la méditerranée (Inmed), mais la nature, l'origine et le remodelage de ces circuits au cours du développement et des pathologies restent à comprendre.
D'autre part, les techniques de génie génétique pour colorer les neurones, développées par Jean Livet, directeur de recherche Inserm à l'Institut de la vision, couplées à la microscopie multi-photons développée par l'équipe d'Emmanuel Beaurepaire, directeur de recherche CNRS au Laboratoire d'optique et biosciences - LOB (illustration ci-dessous / lire le communiqué de presse de 2019), ont démontré leur capacité à cartographier précisément l'architecture complexe des circuits neuronaux et leur évolution au cours du développement.
En combinant ces avancées multidisciplinaires exceptionnelles, HOPE vise à répondre à trois questions interdépendantes :
- L’architecture de l’hippocampe adulte est-elle portée par des circuits spécifiques ?
- Les circuits de l’hippocampe sont-ils précâblés ou façonnés par l'expérience ?
- Comment cette structure se réorganise-t-elle en conditions pathologiques ?
HOPE ambitionne d’apporter un éclairage nouveau sur la fonction de l'hippocampe et le rôle de ses circuits neuronaux grâce à la conception d'une méthode nouvelle, non invasive et universelle pour suivre la croissance et la construction de circuits cérébraux situés en profondeur dans le cerveau, depuis leur neurogenèse jusqu’à l'âge adulte, en conditions normales et pathologiques.
Quantropy
"Entropy in engineered quantum systems - Mesoscopic thermodynamics of correlated quantum states", qui implique :
- Frédéric Pierre, Directeur de recherche CNRS au Centre de Nanosciences et de Nanotechnologies - C2N (CNRS/Univ. Paris-Saclay)
- Des partenaires de Suisse (ETH Zurich), du Canada (University of British Columbia) et d’Israël (Ben-Gurion University)
Dans un matériau métallique commun, les électrons se déplacent en grande partie indépendamment les uns des autres. Mais quand ils interagissent dans un matériau plus complexe des effets fascinants apparaissent, et certains de ces effets présentent un intérêt technologique. Quelques exemples bien connus sont les matériaux ferromagnétiques, dont on peut exploiter les propriétés magnétiques, et les matériaux supraconducteurs, qui transmettent le courant sans résistance.
Il existe un nombre croissant de prédiction pour d’autres états de la matière, dans lesquels les électrons interagissant les uns avec les autres présentent des propriétés contredisant l’intuition. Ces systèmes quantiques d’électrons corrélés sont d’un grand intérêt du point de vue fondamental comme technologique. On peut notamment citer les « fermions de Majorana », des quasi-particules « exotiques » dont les propriétés sont très prometteuses pour de potentiels applications en calcul quantique.
Toutefois, les méthodes de mesures usuelles se révèlent souvent insuffisantes pour révéler la nature des nouveaux états que peut prendre la matière électronique dans les systèmes quantiques. L’objectif du projet Quantropy est de surmonter ce défi en développant de nouvelles approches pour mesurer leurs propriétés thermodynamiques dans des circuits où ces états corrélés seront créés de manière contrôlée. L’éclairage apporté par ces nouveaux développements devrait avoir une large répercussion sur le domaine de recherche traitant des matériaux complexes. Concernant les fermions de Majorana, cette nouvelle approche permettra de montrer s’ils sont vraiment présents dans un matériau.
Les membres de la collaboration ont été pionniers dans ces domaines. Ils combineront leurs expertises pour ce projet. Le groupe de Frédéric Pierre a notamment développé une plateforme expérimentale unique pour réaliser dans des circuits quantiques les états électroniques les plus intrigants (Lire à ce propos sur le site de l’Institut de physique du CNRS (2018) : Repousser la limite de la conductance d’un matériau en contrôlant les interactions entre électrons).